vendredi 27 juin 2014

"BOUCHE du DIABLE" - F.BOUCQ - J.CHARYN - Le LOMBARD (1990)


Un récit en 3 actes, 3 chapîtres qui s'ouvrent tous par une planche de François BOUCQ évidement et qui met en présence, à chaque fois un volatile toujours présent dans cette BD.

Chapître 1 par exemple, une nuées de corbeaux volent en spirale autour de Youri, abandonné à l'âge 4 ou 5 ans en pleine steppe enneigée de Russie...

Chapître 2 : UN corbeau, seul, sur une structure métallique, d'un gratte-ciel Américain en construction...

Chapître 3 : une nuée de volatiles (des colombes cette fois-ci)  tournoient en spirale au-dessus de la Basilique Saint-Patrick.

Dans cette tragique histoire d'espionnage Russe, les volatiles épousent les évènements de la vie de Youri, au début seul abandonné, sans nom, sans personne en plein milieu d'un champs avec ces corbeaux au dessus de lui... puis Youri seul, existant comme espion Russe aux Etats-Unis et rien d'autre, comme ce corbeau seul surplombant le gratte-ciel...
Enfin une Basilique et la pureté de la colombe, Youri aurait-il accès à la rédemption ? Sa secrète foi religieuse qui lui a toujours été interdite l'aurait-elle libérée ?

C'est bien un récit d'élévation que nous propose l'écrivain Américain Jérôme CHARYN, on part de la Nature (steppe Russe) vers la société Capitaliste (structure du gratte-ciel américain) pour finir en pureté spirituelle (les colombes de la Basilique).

Pourtant, de religion il n'en est pas directement question dans ce récit, ou plutôt elle est cachée, silencieuse, tue. Elle reprendra ses droits, symboliquement, à la fin des 120 planches.

Youri enfant abandonné, avec comme signe particulier un bec-de-lièvre (qui lui vaudra le surnom de "Bouche du Diable") est recueillit par une vieille dame qui l'intègre à sa famille de 7 enfants, maltraités par un mari qui a tout des allures d'un ogre. 
Cela commence comme un conte de Perrault.

Youri s'enfuit de cet enfer, seul et se retrouve dans un orphelinat toujours en Russie ou les enfants n'auront de cesse de le harceler et de la maltraiter. Cependant des "visions" de prémonitions lui parviennent durant son sommeil (Boucq choisit le violet pour ces scènes).
Ainsi de l'orphelinat d'Etat de Karkhov il sera selectionné pour suivre un enseignement des plus stricte dans un des centre du NKVD proche de la mer noire, pour en faire un espion efficace.



La parano est en lui, il compte parmis les meilleurs éléments du centre et va devenir l'un de ses envoyés les plus secrets de l'autre côté du monde, dans l'enfer capitaliste de ses ennemis américains. Le camarade Grigory aura juste eu le temps de lui transmettre la foi religieuse, en secret, telle une résistance face à l'interdiction du parti.

Désormais nommé Billy BUD, vivant aux USA avec pour seul confident un Indien (ouvrier des constructions de grattes-ciel, comme lui) Youri muni d'un passé virtuel construit avec précision par ses instructeurs, vit sa vie tel une ombre de lui même... 
Youri ne sait pas qui il est, même son nom lui est inconnu (Youri lui a été donné par la vieille dame), ni sa provenance, ni ses aïeuls...une histoire vide en somme.  Il n'est qu'un outil pour le Parti.
Le voici dans le New York des années 70, avec les recommandations et missions transmises par ses instructeurs Russes... la suite est à lire.

François Boucq offre des planches magnifiques de détails et d'authenticité lorsqu'il dessine New York, le Bronx, et autres décors (la séquence dans les bouches d'égoûts est spectaculaire de rythme et de cadrages par exemple). 
Ses cadrages très cinématographiques comme à son habitude, son encore plus typés ici que dans "La femme du Magicien", autre chef d'oeuvre de BOUCQ et CHARYN. 
Avec François BOUCQ c'est toujours et  toujours une aisance dans le crayonné et une précision du trait mêlé à une impressionnate authenticité sur les sujets dessinés. On ne se lasse jamais de son travail, constant et superbe. En tout les cas moi j'en reste fan depuis plus de 20 ans. Les couleurs sont toutes pertinentes, le rythme envoûtant, pesant aussi nous suit à la trace, nous file, tout au long de la lecture. La fin peut surprendre ou décevoir, à chacun de suivre ce récit jusqu'au dénouement...
Une BD indispensable, un des nombreux piliers de ce siècle de Bande Dessinée.
A noter que Le Lombard en rééditant "Bouche du diable" et "La Femme du Magicien" dans cette nouvelle collection "Signé" offre un très beau travail amélioré des bio des auteurs et d'un cahier graphique (c'est toujours bien venu) pour mieux les celler parmis les plus belles BD.
Je les avais lues en format souple et le rachat dans ce nouveau format est des plus classes.

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